Il est heureux, pour la cause que nous défendons, qu’existent des journalistes comme Nicolas Bérard. Nous ne saurions trop recommander sa rubrique Grr’ondes et ses articles dans le journal mensuel « l’âge de faire » (https://lagedefaire-lejournal.fr/). Nous avions également apprécié ses livres passés, « Sexy Linky » et « 5G mon amour ».
Il publie cet été un nouvel ouvrage intitulé « Ce monde connecté qu’on nous impose » et sous-titré « Le comprendre et le combattre ». Ce livre-là-est, lui aussi, très bienvenu.
Les écrits de Nicolas Bérard sont très pédagogiques, souvent teintés d’humour mais toujours bien documentés. Ce petit dernier ne déroge pas à la règle.
Dans la première partie, l’auteur explique comment le numérique envahit nos vies et nos esprits, et comment cet envahissement est en passe d’être multiplié, de par l’avènement de la 5G et de la multitude d’objets connectés qui lui sont ou seront associés. La 5G n’apportera pas, en effet, d’avancées considérables dans l’utilisation classique des téléphones portables. Son but principal n’est pas là. Il réside dans la possibilité de mettre en fonction des objets connectés de toutes sortes, dans le plus de lieux possibles et dans tous les domaines de la vie. Santé, automobile et transports, formalités administratives, villes dites « intelligentes », habitation, vie quotidienne, tout y passe, au point parfois de friser le grotesque. L’auteur démontre, exemples à l’appui, en quoi ces objets connectés ne sont ni nécessaires ni même, pour beaucoup, bénéfiques.
Pour reprendre ses mots, à force d’être connectés avec l’extérieur, nous risquons de plus en plus de nous retrouver déconnectés de nous-mêmes. Ces multiples connexions, relayées principalement par le smartphone, constituent un véritable hold-up de l’attention et de la concentration des utilisateurs. Les jeunes sont particulièrement touchés, ce qui ne va pas sans sérieux dégâts sur le plan psychologique et sur celui de l’apprentissage. Le reste de la population, peut-être un peu moins vulnérable, est cependant largement touché. La dépendance psychique au numérique et, en particulier au smartphone, peut être considérée chez beaucoup comme une véritable addiction, entretenue par les multinationales du web à la manière dont les dealers entretiennent celle à d’autres drogues.
Ce monde connecté s’impose donc grâce à la vulnérabilité de la population, aux manœuvres des industriels pour rendre la population« accro ». Elle s’impose également du fait de la volonté de monde politique, suivant en cela les souhaits des industriels. La 5G aujourd’hui, comme la 4G hier, est déployée dans le déni de tout processus démocratique. Il ne peut même pas être l’objet de discussion véritable au prétexte qu’il n’y aurait pas d’alternative envisageable.
Puis, dans la seconde partie de l’ouvrage, Nicolas Bérard apporte des réponses à la question : « Concrètement, on fait quoi ? ». Ces réponses, il les puise dans des exemples de lutte glanés aux quatre coins de la France : Zad des services publics initiée par des syndicalistes d’EDF à la Courneuve rétablissant le contact physique avec les usagers, parade inventée par la Cimade pour rendre visible les effets de la numérisation forcée des formalités à remplir par les migrants, refus par des paysans du puçage de leur bétail, actions, légales ou pas, de collectifs d’habitants en Bretagne pour faire capoter des projets d’implantation d’antenne-relais...Cette revue d’exemples montre au passage que les résistances s’expriment un peu partout et sur la large gamme de domaines que touche cette invasion du connecté. Certes, ces combats ne sont jamais faciles mais ces exemples montrent que solidarité, détermination, courage… et créativité sont les ingrédients d’un succès jamais acquis d’avance mais jamais impossible non plus.
Et puis, il y a ce que nous pouvons faire individuellement et Nicolas Bérard insiste sur un comportement-clé : se passer de smartphone. Il raconte comment il a lui-même fait ce pas et s’est sevré de cet appareil comme on se sèvre du tabac. « Réapprendre à vivre sans béquille numérique », établir le « téléphone à clapet comme une sorte de sommet technologique à ne pas dépasser pour préserver la planète, son cerveau et sa liberté »….parce qu’après tout, c’est bien de liberté qu’il s’agit. « Ils ne sont grands que parce que nous avons la nuque baissée ».
A lire donc et à faire circuler. En prime, en fin d’ouvrage figure une boîte à outils toujours utile (argumentaires, trucs pour agir, bonnes adresses, références documentaires,…).
En vente en librairie à partir du 25 Août 2022 ; d’ores et déjà disponible via le site du journal « L’âge de faire » (lagedefaire-lejournal.fr).
Par Denis Bourgeois pour Robin des Toits